Un Amour IN-Dépendant : une exploration poétique de l’attachement et de la liberté
- Marion Bbkr
- 8 mars
- 4 min de lecture

L’amour est-il une cage dorée ou un envol ? Doit-on aimer à corps perdu ou garder une part de soi inaliénable ? Ce sont ces interrogations que déplie Un Amour IN-Dépendant, un recueil à la fois intime et universel, où chaque vers semble être un battement de cœur suspendu entre la quête de l'autre et la réaffirmation de soi.
Une poésie du paradoxe : entre fusion et affranchissement
Manon Guilloteau nous entraîne dans une danse amoureuse où l'on vacille entre l'abandon total et la nécessaire préservation de soi. Le recueil se déploie en plusieurs mouvements, alternant entre des poèmes de l’élan passionné et d’autres, plus introspectifs, qui interrogent la notion de dépendance affective.
Certains vers résonnent comme un cri : "Hurler dans le silence/Ma liberté, ma résilience." D'autres, comme un murmure résigné : "Alors laisser partir les illusions,/Défaire les sentiments,/Taire l'ardente affection,/Dire au revoir. Infiniment.". Parfois c'est le silence qui opère et devient une arme puissante : "J'entends le bruit se taire" "Par la force de mon silence, je t'achèverai." "Tu me regardes et ne dis mot". "Alors se taire et s'embrasser"
Manon Guilloteau reprend ici l'un des grands questionnements de la littérature amoureuse : comment conjuguer amour et liberté ? En cela, elle s'inscrit dans la lignée de poètes comme Paul Éluard qui écrivait : "Je suis partout en toi", soulignant cette ambiguïté de l'amour qui est à la fois refuge et dissolution.
Une structure en vagues, entre proximité et rupture
Le recueil est construit comme une houle : il nous emporte, nous submerge, avant de nous laisser seuls face à l’absence. L’amour y est une marée montante, irrésistible, enivrante, avant de devenir un reflux violent qui laisse à découvert le sol nu de la solitude.
Ce cycle est particulièrement frappant dans le poème visuel "amour/mort", où les mots eux-mêmes se fragmentent, se brisent sous la force du ressac. L’amour devient océan, engloutissant d’abord le corps et l’âme dans une passion absolue.
Ce passage saisissant fait écho à l'idée que l'amour est aussi un péril, une disparition de soi dans l’autre, jusqu'à l’anéantissement. Il rappelle l’image antique des sirènes chantant la promesse d’une félicité qui n’est qu’un leurre, menant ceux qui les écoutent à la perte. La poésie de Manon Guilloteau n’est pas seulement une ode à l’amour : elle en révèle aussi la menace, le gouffre, l’âpreté de l’après.
La douleur et la reconstruction : renaître après l’amour
Il n'y a pas d'amour sans douleur, et Un Amour IN-Dépendant ne cherche pas à l'éviter. L'autrice dissèque les blessures, les silences qui pèsent, les attentes déçues.
"Alors dans un sourire, /Tu pars." "Je tangue, le cœur en errance./En moi, un vide immense."
Ces vers traduisent la peine de l’amour incomplet, de l’attente vaine, où la souffrance devient un personnage à part entière du récit. Manon Guilloteau nous rappelle ici que la douleur n’est pas un accident de l’amour, mais bien une de ses composantes inévitables. Comme Marguerite Duras dans L’Amant, elle expose cette blessure sans fard, lui laissant toute sa place au sein du texte.
Mais au-delà de la douleur, le recueil trace aussi le chemin d’une reconstruction. Il n’est pas question d’un renoncement amer, mais d’une mue, d’une renaissance. L’autrice transforme la perte en un espace de redécouverte de soi.
"Cette Rencontre et cet Amour font partie de mon chemin./Tu représentes une ouverture vers l’authenticité./Celle que tu prônais tant et que tu m’as apprise./Une ouverture vers un nouveau demain Magnifique."
Ces mots rappellent les principes du kintsugi, cet art japonais qui consiste à réparer les céramiques brisées avec de l’or, sublimant ainsi les fissures plutôt que de les masquer. L’amour laisse des cicatrices, mais celles-ci deviennent la marque d’une force retrouvée.
Une écriture ciselée, où chaque mot pèse
Manon Guilloteau a une approche minimaliste de l'écriture, où chaque mot est pensé, pesé, ajusté. Son style se distingue par une économie de moyens qui amplifie l'impact émotionnel. Loin de s’appuyer sur des envolées lyriques, elle privilégie la sobriété, laissant ainsi la place aux silences et aux respirations.
Dans plusieurs poèmes, l’absence de ponctuation et l’utilisation de vers courts renforcent l’impression d’une parole fragmentée, haletante, comme si chaque mot était arraché au silence. Ce dépouillement sert parfaitement le propos du recueil : l’amour, la perte et la reconstruction ne se disent pas en longs discours, mais en éclats de phrases, en images fulgurantes. L'emploi du "tu" et du "je" crée une proximité qui donne l'impression de lire une correspondance intime, un journal à demi-mots.
"Parce que je t'aime/je te demanderai un amour absolu." .
La brièveté traduit l'hésitation, la lutte interne. Manon Guilloteau joue avec la disposition des mots sur la page pour créer un rythme visuel qui accompagne le souffle du lecteur. Le vide, le noir et blanc, l'espace hautement visuel sont aussi signifiant que les mots eux-mêmes, laissant la part belle à l’écho des émotions.
Enfin, l’utilisation récurrente d’images élémentaires, comme le feu ou la lumière, donne au texte une dimension universelle. Plutôt que de raconter, elle suggère, laissant au lecteur le soin de projeter ses propres souvenirs et douleurs dans les interstices du texte.
Un recueil-miroir, à offrir et à s’offrir
Loin d'être un simple livre sur l’amour, Un Amour IN-Dépendant devient un miroir où chacun peut projeter ses propres doutes et espoirs. Son format intime et sa poésie accessible en font un cadeau parfait, à la fois réconfortant et révélateur.
D'un point de vue littéraire, il s'adresse aux amateurs de poésie contemporaine, aux âmes sensibles aux mots pesés et aux silences chargés de sens. D'un point de vue plus pragmatique, il constitue un cadeau idéal : que l'on soit en quête d'une lecture qui apaise ou d'un présent chargé de sens, ce recueil s'impose comme une évidence.
Une dernière note, suspendue
Il y a, dans ce livre, cette part de mystère propre à l’amour lui-même, cet entre-deux insaisissable où l'on danse au bord du vide, où chaque mot pèse tout en restant léger. Comme écrivait Paul Éluard : « Il n’y a pas de hasard, il n’y a que des rendez-vous. » Peut-être ce recueil est-il le rendez-vous que vous attendiez, un entrelacs de pages où l'on se perd pour mieux se retrouver ?
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